Relocalisation circulaire

La relocalisation de l’économie et du travail est sur toutes les lèvres des décideurs économiques et politiques européens.
Mais c’est sans doute plus facile à dire qu’à faire.

Comment s’y prendre pour bien faire en limitant les effets négatifs en termes d’emploi ou de pouvoir d’achat ?

La transition circulaire pourrait être la voie à suivre.


C’est le bon moment

Au printemps 2020, en pleine crise COVID, les approvisionnements en équipements sanitaires et médicaux, mais également en médicaments ou encore en matériel informatique se sont révélés compliqués voire impossibles.
Tel un balancier dont le mouvement s’inverse progressivement, après avoir décidé de délocaliser ses usines de production en Asie, l’Occident réfléchit à relocaliser une partie de sa production.

C’est une situation exceptionnelle et pour la première fois, l’Europe ne peut compter que sur elle-même pour redémarrer. Le grand défi de l’Europe est alors de créer les conditions de son autonomie économique.
C’est d’ailleurs l’un des objectifs du grand plan de relance de 750 milliards d’euros lancé par l’Union européenne.

L’intention est fabuleuse me direz-vous mais comment traduire cette dynamique localement ?

Les modèles économiques actuels sont majoritairement linéaires (extraction-consommation-destruction des ressources).
Ce mouvement de destruction est amplifié par la mode, la frénésie de la consommation, et le pouvoir d’achat des consommateurs, sans beaucoup d’attention aux enjeux de résilience à l’échelle planétaire ou locale, et encore moins aux questions de fin de vie des produits et équipements.
Cela signifie que notre économie extrait énormément de ressources qui ne sont utilisées que pendant une période très courte avant de se transformer en déchet.


Et si le problème devenait la solution ?

Et si tous les produits en fin de vie, les invendus, les chutes de production et l’ensemble des autres déchets connaissaient une deuxième, voire une troisième vie ?

C’est aussi cela la raison d’être de l’économie circulaire : maximiser la valeur d’usage pendant la période la plus longue possible.

Pour illustrer notre argument, quelques exemples de trésors qui se cachent dans la métropole Bruxelloise :

  • La majorité des équipements sont détruits, recyclés sans vérifier leur réparabilité ou possibilité de réutilisation. A titre d’exemple 75% des aspirateurs et des ventilateurs ou encore 25% des grilles pains et fers à repasser déposés par les Bruxellois-e-s aux parcs à conteneurs fonctionnent encore mais sont actuellement détruits en dehors de la Région Bruxelloise, sans être testés.
  • Les retours des ventes en ligne constituent souvent un réel défi pour les commerçants. Comment vérifier, laver, remettre à neuf les 8% de vêtements commandés en ligne et retournés endéans les 2 semaines par les « Selfie Addicts » qui ne porteront ces vêtements que le temps de se prendre en photo. L’enjeu est tout aussi complexe pour des équipements de sports livrés et aussi tôt retournés, avec quelques dégâts, par des clients ayant changés d’avis ?

Autant d’exemples qui illustrent la nouvelle tendance initiée par plusieurs chaînes de magasins qui adaptent leurs processus logistiques pour redonner une deuxième vie aux produits.

Cette dynamique permet de créer des emplois qualifiés (gestion de projets, transformation des processus logistiques, etc. ) et infra-qualifiés (transport, nettoyage, petites réparations, etc.) tout en relocalisant progressivement des activités économiques et l’emploi, ici, en Europe.

Mieux encore, cette dynamique permet de renforcer la valeur ajoutée locale des commerçants en diversifiant leurs métiers avec intelligence et imagination.


La mayonnaise est en train de prendre

Bien sûr que non, ce n’est pas de la science-fiction !
La preuve : Plusieurs entrepreneurs et artisans circulaires de la Région de Bruxelles-Capitale sont déjà en train d’ouvrir la voie de cette relocalisation qualitative de l’économie 
:

  • Envie de vêtements uniques ?
    Isatio récupère des échantillons de l’industrie textile et les transforme manuellement et localement en une collection exclusive de vêtements et accessoires uniques pour femme.
  • A la recherche de solutions pour votre logement ?
    Rotor DC démonte et récupère des matériaux sur des chantiers de travaux. Ils sont ensuite valorisés et réutilisés sur des nouveaux chantiers ou vendus en pièce unique à des professionnels du bâtiment et des particuliers.
    BC Materials transforme les terres de déblai en matériaux de construction de terre crue, tels que des briques en terre comprimée, des enduits et du pisé.
    Ces matériaux ont un bilan carbone neutre et assurent une atmosphère saine dans le bâtiment.
    Dzerostudio est un bureau d’architecture qui développe des concepts et des projets innovants en économie circulaire à différentes échelles. Ils développent notamment des prototypes de mobiliers ou des systèmes constructifs avec des déchets de chantier ou des matériaux issus de déconstruction d’immeubles.
  • Besoin d’un ordinateur performant ?
    CF2D revalorise des Déchets d’Equipement Electriques et Electroniques par des activités dans les domaines de l’économie sociale et de l’environnement : collecte, remise en service et recyclage de matériel informatique.
  • L’ouvroir revalorise tous types de textiles, papiers, cartons et objets par des techniques d’assemblage et de confection. Cette entreprise de travail adapté s’associe aussi à des designers pour la production de prototypes.

Ces pionniers de l’économie circulaire démontrent, s’il en était encore besoin, qu’il existe un savoir-faire important pour repenser et relocaliser l’économie autrement, plus durablement.


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