Valeurs de luxe

Plus personne évidement ne pense que création et fabrication circulaire riment avec bas de gamme et qualité moyenne.
N’est-ce pas ?

Parce que si on y regarde de plus près, c’est assez souvent le contraire.
L’un des mots-clefs de l’économie circulaire, c’est revalorisation.
Des produits, des matériaux, des déchets…
Et qui dit « revalorisation » dit « création de valeur ».

Or, parmi les plus puissants moteurs de cette création de valeur, il y a bien sûr le talent du créateur ainsi que la qualité du produit fini.

Et, c’est là qu’on entre dans le monde lumineux de la mode et du luxe circulaire…

Pour en témoigner, nous avons eu le plaisir de rencontrer Gaëlle van der Haegen, designer et créatrice de la marque bruxelloise de maroquinerie de luxe Yuso.

Parce qu’en réalité, création et fabrication circulaire riment avec élégance, design et artisanat de haute qualité.


Des racines au Pays du matin calme

Avant toutes choses, Yuso c’est une histoire. Une histoire qui commence en Corée du Sud…

C’est ce que nous explique Gaëlle :

« Lancée en juillet 2016, notre marque de maroquinerie de luxe est très liée à mon histoire personnelle.
Yuso est un mot coréen qui veut dire à la fois ‘Origines’ et ‘Volonté’. J’ai choisi ce nom parce que je suis moi-même d’origine coréenne. Je suis née en Corée et j’ai été adoptée à 7 ans par des parents belges. A un certain moment de ma vie, vers 30 ans, à un âge où je m’interrogeais beaucoup sur mon identité, j’ai souhaité revenir sur ces traces et partir en Corée. J’ai pris le temps, avant de partir, d’apprendre le coréen pour vraiment comprendre le pays et les gens là-bas. 
Le voyage s’est très bien passé et, à mon retour, j’ai eu envie de lancer un projet qui puisse me connecter avec mes racines et c’est comme cela que j’ai lancé en 2016 la marque Yuso ».


Alchimie des cultures

Pour Gaëlle, cette ouverture au monde et à ses richesses est essentielle. Et, pour cela, elle s’est nourrie de toutes les facettes de son histoire personnelle. C’est bien cela ?

« Absolument. Il n’y a pas que dans le nom que j’ai voulu exprimer ces origines. Etant à la fois belge et coréenne, j’ai voulu créer une marque qui soit vraiment multiculturelle en créant des sacs à main et des accessoires de modes qui soient vraiment inspirés par la diversité.
Et cette diversité se nourrit aussi de cette richesse que mes parents nous ont offerte à mes frères et sœurs. J’ai, en effet, été élevée dans une famille nombreuse. Mes parents ont eu des enfants biologiques et ils ont également adopté des enfants de différentes origines. C’est ainsi que j’ai des frères et sœurs d’origine thaïlandaise, colombienne et coréenne. Et ma petite sœur, à son tour, a adopté un enfant éthiopien et une enfant haïtien.
Ainsi, on a toutes les origines du monde dans notre famille. J’ai donc toujours baigné dans ce mélange de cultures.
Et c’est cela, Yuso, des objets de mode inspirés par la diversité ».


Le luxe et l’éthique

Yuso, c’est une histoire, mais ce sont aussi des produits de maroquinerie haut de gamme. Et circulaires.

« Oui, c’est cela. Principalement des sacs à main et des accessoires de mode qui s’adressent surtout à des femmes mais aussi, depuis l’année passée, des accessoires pour homme,  des bracelets et des ceintures en cuir.
Tous ces accessoires de mode sont créés avec des surplus de cuir que je rachète auprès d’une tannerie, des pièces de cuir inutilisées, destinées à être jetées, souvent parce qu’elles ont de petits défauts. Je rachète aussi des chutes de cuir auprès de mon maroquinier et auprès d’autres créateurs belges. »

Cette dimension éthique, matérialisée par le caractère circulaire de sa production, est fondamentale pour Gaëlle.

« Cela fait partie des valeurs de la marque. C’est essentiel, surtout dans le contexte actuel, dans ce monde de surconsommation à l’échelle globale dans lequel on produit et on gaspille à n’en plus finir ».

“Je voulais donc vraiment aller dans cette direction, proposer des produits de luxe qui soient aussi éthiques. C’est important pour moi”.

Gaëlle van der Haegen, créatrice de la marque Yuso

Secrets de fabrication

Être créatif, c’est une chose.
Fabriquer et vendre des produits de maroquinerie de luxe, c’en est une autre.

Du coup, Gaëlle, comment se passe la fabrication ?
« En fait, moi, je créé les design des produits, les modèles des sacs et des accessoires de mode.
Pour ce qui est des sacs, je fais les dessins et je choisis les cuirs et les accessoires (les boucles, les tirettes, etc.) pour trouver les bonnes combinaisons. Puis j’apporte cela à mon maroquinier qui prend en charge la production elle-même. Ce sont évidemment des petites quantité, voire des pièces uniques.


Pour ce qui est des accessoires de mode, que ce soient des écharpes ou des foulards, c’est moi qui les fabrique intégralement. J’achète des coupons de tissu, de laine ou de soie, et je les produits moi-même.  
Et pour cela, bien sûr, j’ai dû apprendre.
Pour moi, cela a commencé le jour où j’ai reçu dans ma boîte aux lettres une newsletter de Crea Corner, qui proposait de faire un stage pour créer son sac de plage.
Et là, ça a fait tilt ! Je me suis inscrite à des cours de couture, 3 heures par semaine. Et c’est comme ça que j’ai appris, avec toujours cette idée de faire des sacs et encore des sacs. Et ça m’a tellement plu que je me suis racheté une machine à coudre, puis une autre… et c’est ainsi que je me suis lancée en créant Yuso en 2016 ».

Comme quoi, quand on fait les choses avec plaisir et passion… 


Témoignage de créatrice

Dans le paysage de l’économie circulaire bruxelloise, Yuso se distingue par son positionnement de marque.
Comment, dans un environnement hautement concurrentiel, lance-ton une marque de luxe ?

Dis-nous, Gaëlle, comment as-tu relevé ces défis si particuliers ?

« Créer une marque de luxe en Belgique, c’est vrai que ce n’est pas évident. Il faut que les gens soient prêts à payer le prix.
Or, quand on lance une marque, surtout une marque de luxe, on part de zéro. Et les gens aiment les valeurs sûres telles que Delvaux, Louis Vuitton ou Hermès qui, elles, vendent d’ailleurs à des prix bien plus élevés que les nôtres.
Pour se positionner, cela demande donc du temps et de travailler énormément sur l’image, la visibilité, la notoriété… Il faut être présent dans la presse, faire parler de la marque, investir dans la publicité… 

Et, avec le temps, lorsque les clients voient que la marque perdure, s’installe… ça les rassure évidement.
Aujourd’hui, j’ai des clients fidèles qui ont acheté plusieurs modèles. Et souvent, cela a commencé parce qu’ils nous ont découverts dans la presse ou sur nos publicités. Aujourd’hui, malgré la crise sanitaire, j’ai l’impression que ma marque se développe plutôt bien ».  

Voilà donc l’un des secrets d’une marque de luxe qui marche…


Le chemin de la création

Comment en arrive-t-on à se lancer dans un telle aventure ?
C’est ce que nous avons voulu savoir. 

 « En fait, je suis indépendante depuis 2004, lorsque j’ai créé ma société de consultance en ressources humaines. C’est donc mon métier premier. Et, après 20 ans d’expérience professionnelle, j’avais un peu l’impression d’avoir fait le tour, de ne plus apprendre.
Et puis il y aussi le fait que le côté créatif me manquait énormément. »

C’est vrai que, quand on pense RH, on ne pense pas immédiatement à créativité…

« Effectivement. Les ressources humaines, ce sont des matières très procédurales. Il n’y a pas vraiment moyen d‘être créatif dans ce domaine-là. C’est donc aussi pour cela que j’ai créé Yuso, pour pouvoir exprimer cette créativité, en créant des produits de A à Z qui puissent évidement satisfaire des clients.
Au début, c’était une activité complémentaire à mon activité principale de consultante RH. Le temps passant, je voulais vraiment m’y investir de plus en plus et réduire cette partie ressources humaines pour pouvoir développer davantage mon activité de création.
Aujourd’hui, j’en suis arrivée à consacrer 4 jours par semaine à Yuso en conservant une journée pour mon activité de conseil. »


Projet de vie

A toutes celles et ceux qui souhaitent se lancer dans la création d’une marque de mode, Gaëlle a tenu à faire part de son témoignage :

« La vie d’entrepreneur, c’est un combat constant, c’est essayer d’être le plus innovant possible, être créatif, trouver des nouveautés, sortir des sentiers battus en fait. C’est uniquement comme cela qu’on peut avancer.
Et, avant tout cela,  c’est un cheminement intérieur qui se fait et qui aboutit à un projet. On démarre quand le projet est mûr, quand il est réfléchi. C’est véritablement un voyage. Je ne crois pas qu’on puisse se lancer du jour au lendemain. Cela demande de se former, d’apprendre, d’échanger avec d’autres personnes qui vont vous inspirer.
Ces rencontres avec les bonnes personnes sont aussi essentielles pour se préparer. Personnellement, j’ai eu cette chance par exemple de rencontrer un bon maroquinier en qui je puisse avoir confiance. 

“A toutes celles et ceux qui y pensent, je dirais aussi que c’est important d’être honnête avec soi-même, être authentique, croire dans son projet et le construire en cohérence avec ses valeurs profondes”.

Gaëlle van der Haegen, créatrice de la marque Yuso

“Il faut pouvoir démontrer que ce qu’on dit, c’est bien ce qu’on fait.
Qu’est-ce qui nous inspire ? Qu’est ce qui nous fait vibrer ?
Ces questions sont essentielles pour être véritablement en lien avec soi-même
 ».


My Yuso

La marque existe aujourd’hui et elle se porte bien.
Du coup, Gaëlle, tes projets pour cette nouvelle année ?

« Eh bien, j’aimerais créer un nouveau service, un service de personnalisation.
Un produit de luxe, c’est un privilège et je veux que ce privilège se traduise dans l’offre d’un produit qui rencontre encore davantage les désirs de mes clientes et de mes clients. Notamment en personnalisant mes sacs, en proposant à celles et ceux qui le souhaitent de choisir leur modèle, le cuir qui les intéresse et les accessoires qui vont avec.
Chaque femme pourra porter un sac unique, parce que chaque femme est unique ».  


Un petit mot pour vous

Cette nouvelle année sera meilleure que la précédente. En tout cas, on peut l’espérer.
Pour mettre du vent dans ces voiles qui nous portent vers des eaux moins troublées, nous avons demandé à Gaëlle son petit mot pour vous, chères lectrices et lecteurs.
Et nous n’avons pas été déçus :

« J’ai un adage que j’aime beaucoup et qui dit : ‘Je veux vivre mon rêve plutôt que de rêver ma vie’.
A partir du moment où l’on a un rêve,  qu’on y croit et qu’on a envie de le réaliser, il faut y aller !
On peut toujours se dire qu’on n’en est pas capable, que ce n’est pas le bon moment, qu’on n’a pas les moyens… tous les arguments sont bons pour ne pas franchir le pas.
Mais si vous avez un rêve, allez-y ! Faites-en sorte que votre rêve se réalise. Quand on aime ce qu’on fait, on le fait toujours du mieux possible ».

C’est ce que nous vous souhaitons, nous aussi, pour cette nouvelle année.
Vivons nos rêves !


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