Avec l’économie circulaire, on aura compris que l’économie, ce n’est pas que des méchants requins capitalistes qui vendent des choses qui n’existent pas et qui détruisent de belles choses qui existent.
Non, évidemment, ce n’est pas que cela.
L’économie, c’est également tout ce qu’on vous raconte dans votre LIVELY, et c’est aussi le commerce équitable et durable, par exemple.
Autant de secteurs et d’activités qui commencent à compter.
Et puis, surtout, parce que fondamentalement, l’économie c’est nous.
C’est notre travail, mais c’est aussi nos achats bio et durables, les bonnes affaires à la brocante ou le temps qu’on passe à bricoler dans notre maison qui s’usera ainsi un peu moins vite.
Mais là aussi, l’économie ce n’est pas que cela non plus.
En effet, il y aussi l’économie contributive, un truc vraiment magique qui commence aussi à compter.
Ab, ben c’est super, effectivement.
Mais c’est quoi, au fait ?
Vous avez raison, commençons par ça.
Valoriser les bonnes volontés
Sur le fond, l’économie contributive repose sur les bonnes volontés des uns et des autres.
Il n’y donc là rien de révolutionnaire, vous en conviendrez. Effectivement.
Sauf que la différence, c’est que cette économie contributive repose sur une évaluation de la valeur de ces bonnes volontés et sur l’intégration de cette valeur dans le système économique et social collectif.
Ceci fait, on peut, par exemple, échanger ces gestes de bonne volonté ou les récompenser.
A partir du moment où on leur reconnaît une valeur monnayable, elle s’intègre dans le système.
Évidemment, sans exemple concret, on reste un peu dans le flou et dans le baratin.
Ok. J’admets.
Un exemple alors, très concret, local et proche de chez nous.
Ben oui, soyons honnêtes, en Belgique tout est proche de chez nous.
Des ploufs et des gaufres
A Bonheiden, en Province d’Anvers, les enfants qui se rendent à vélo à l’école reçoivent des « Ducats », une pseudo-monnaie locale qu’ils peuvent utiliser pour payer l’accès à la piscine, à la patinoire ou encore pour se payer des gaufres ou des tours de manège lors de la kermesse annuelle.
Cette initiative futée a été évaluée et les résultats sont carrément intéressants.
Jugez plutôt : Après un an, cela représente près de 236.000 km de trajets réalisés par les enfants à vélo, soit l’équivalent de 20.000 litres de carburants non-consommés et de 46 tonnes de CO² épargnées.
Bref, tout le monde est gagnant.
Les enfants font plus de sport, la qualité de l’air s’améliore, le trafic automobile est réduit, la Commune atteint ses objectifs de mobilité et climatiques et les élus locaux peuvent allégrement se friser la moustache.
Je vous l’avais dit, c’est simple, malin et efficace.
Un autre exemple très parlant aussi, c’est bien entendu l’un de nos grands chouchous, l’encyclopédie universelle et participative Wikipédia et ses projets frères ou sœurs qui reposent tous sur ce modèle de l’économie contributive.
Quelques principes
Le fait est que ce n’est pas avec les Ducats de Bonheiden qu’on va résoudre la crise climatique mondiale.
Quoique.
Différents économistes se sont penchés très sérieusement sur la question, en particulier le français Bernard Stiegler et l’association Ars Industrialis qui ont mis en évidence 3 grands principes importants de cette économie contributive :
1. L’usager du service est potentiellement à la fois consommateur et producteur du service.
Par exemple, chez Wikipédia, les rédactrices et rédacteurs des articles sont aussi des utilisateurs de l’encyclopédie et de ses riches contenus.
C’est le cas aussi des logiciels libres, modèle dans lequel les utilisateurs apportent leur contribution en améliorant le logiciel qu’ils utilisent.
2. La valeur produite par les contributeurs n’est pas intégralement monétisable.
3. La production crée à la fois du savoir-faire et du savoir-vivre, et dépasse ainsi la simple subsistance.
Haute Valeur Sociétale & Environnementale
A ces principes intéressants, nous pouvons ajouter les considérations suivantes, toute aussi importantes selon nous :
- Les contributions des usagers dans ce système ont généralement une très grande valeur sociétale et / ou environnementale, notamment comme dans notre exemple belge en réduisant les externalités négatives (la pollution).
- Dans certaines situations tout à fait intéressante, ces contributions de l’économie participative permettent de réduire également les coûts de traitement de ces externalités par les pouvoirs publics (l’Etat, les Communes, etc.).
A Bonheiden, ils peuvent se réjouir d’avoir réduit le nombre de voitures dans la ville simplement en incitant les enfants à prendre leur vélo pour se payer des trucs chez les commerçants et les services publics locaux.
C’est doublement, voire triplement gagnant.
Ils sont malins à Bonheiden. - Si l’on tient compte de tout cela, on voit qu’une véritable mécanique vertueuse peut se créer entre ces gestes contributifs des citoyens qui entrainent une réduction des dépenses liées au traitement des externalités.
Et, grâce à ces économies, on peut créer des leviers de financement pour soutenir de nouveaux projets d’économie participative.
Le principe même d’une spirale vertueuse.
On s’y met ?
Chez LIVELY, on n’est pas trop du genre à dire « Ya qu’à » ou « Faut qu’on ».
Quoi que… Un peu quand même. Faut reconnaître.
Mais c’est pour mieux partager avec vous, lectrices et lecteurs adoré(e)s.
Et, ici, il s’agit juste d’identifier quelques ingrédients qui nous paraissent essentiels pour un projet d’économie contributive (certains sont d’ailleurs assez proches et / ou complémentaires de ceux concernant les Biens Communs) :
- Des énergies fédérées
Le fait est qu’on ne fait pas de l’économie contributive tout seul. Il faut un projet collectif qui associe les bonnes volontés d’une communauté (comme pour les Biens Communs, d’ailleurs qui posent certaines règles importantes à ce sujet dont on vous recommande la lecture). - Une capacité à évaluer ces gestes participatifs et de bonne volonté
On n’est évidemment pas obligé de sortir sa calculatrice programmable mais le fait est que, pour pouvoir instaurer un système d’échange (la base de l’économie), il faut pouvoir établir ensemble une évaluation du geste participatif, une sorte d’équivalence, de monnaie.
A Bonheiden, du haut de mes 9 ans et demi, je roule un kilomètre à vélo, je gagne 5 Ducats avec lesquels je vais pouvoir m’acheter une boule à la vanille à la kermesse. Logique. - Une certaine participation des pouvoirs publics
Ce n’est pas forcément indispensable mais c’est plus que souhaitable.
L’engagement du politique, qui peut être tout à fait local, permet de légitimer et d’institutionnaliser le système mais, surtout, il permet de l’intégrer plus en profondeur dans l’économie réelle en donnant accès notamment à des services publics ou en acceptant la conversion de la « monnaie participative » en monnaie réelle pour les commerçants qui jouent le jeu, comme à Bonheiden.
Pour la bonne bouche
Évidemment, il n’y a pas qu’à Bonheiden qu’on de bonnes idées.
Mais c’est vrai que celle-là, on l’aime bien.
Du coup, pour les fines gueules de la Grande Transition, quelques autres exemples inspirants :
A Lathi, en Finlande, les citoyennes et citoyens mesurent leurs émissions de CO² pendant leurs déplacements.
En plus de prendre conscience des impacts sur la planète de leurs moyens de transport, elles et ils peuvent convertir chaque mois leur quota de CO² inutilisé en achats de produits durables locaux. Le principe est donc assez proche de celui mis en place à Bonheiden.
La bonne volonté, le geste positif pour l’environnement, la ville et la santé collective nourrissent le tissu économique local.
L’objectif affiché dans ce cas n’est pas une réduction de coûts directs pour la collectivité mais bien de contribuer à l’atteinte des objectifs climatiques à l’échelle globale, tout en réduisant les coûts de santé liés à la pollution de l’air.
C’est un peu moins évident et illustratif mais le système mis en place en en Wallonie et à Bruxelles pour récompenser la remise en état de certains déchets-ressources fonctionne fondamentalement sur le même principe.
Ainsi, les membres de la Fédération RESSOURCES (notamment TERRE, Les Petits Riens et Oxfam) collectent et remettent en état des déchets-ressources tels que des vêtements ou des objets de décoration par exemple.
Cette activité permet de fait à l’Etat de réduire ses dépenses en coûts de collecte et de traitement des déchets, générant ainsi des économies qui vont faire effet de levier grâce auxquelles les membres de RESSOURCES reçoivent une compensation financière par tonne collectée.
Ils se dotent ainsi de moyens complémentaires avec lesquels ils peuvent développer de nouvelles actions et venir en aide à plus de publics en difficulté.
A Bordeaux (en France évidemment), le magasin de la marque VEJA installé dans l’espace expérimental DARWIN récupère les chaussures de sport usagées (toutes marques pas que les Jordan Air) des clients pour récupérer leurs composants et les réutiliser ou les recycler afin de produire voire d’imprimer en 3D de nouvelles chaussures « rebrandées » VEJA.
Super projet et chouettes baskets !
Les clientes et les clients qui contribuent à cette dynamique reçoivent en récompense 10% de réduction sur l’achat de nouvelles sneakers qui pourront à leur tour être revalorisées le moment venu.
Une approche originale qui offre un nouveau regard sur les frontières entre les marques et leur responsabilité élargie en tant que producteur de… déchets-ressources.
Et pour vous, ce sera quoi ?
Pistache chocolat ? Spéculoos caramel ?
Des glaces et gaufres locales en tout cas, ça c’est sûr.
Et pourquoi pas les produits de l’économie circulaire bruxelloise payés avec des déplacements en vélos ?
En tout cas, nous on est pour.
Parce que l’économie, c’est nous.
Et c’est à nous de décider.
BIZZZ et merci à tous.
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